Stefan ZWEIG à Paris et ailleurs

15 rue de Beaujolais à Paris, où se trouvait l'hôtel.
15 rue de Beaujolais à Paris, où se trouvait l’hôtel.

« Des soldats de Hitler montent la garde devant l’Arc de triomphe. La vie n’est plus digne d’être vécue. J’ai presque 59 ans, et les années à venir vont être effroyables -à quoi bon se prêter encore à toutes ces humiliations ? »

Journal, 15 juin 1940 (quelques jours avant de partir pour le Brésil).

Fin 1904, le viennois Stefan Zweig s’est promis de s’offrir un cadeau : passer six mois à Paris après avoir achevé son doctorat sur Taine.

Paris est, pour lui comme pour les artistes et écrivains de son époque, la capitale de la culture, et donc un passage obligé (c’est d’ailleurs à Paris que Zweig rencontrera Rilke) !

Suivant les pas de l’histoire et des écrivains qu’il aime, il n’y fréquente pas que les milieux littéraires et artistiques. Entre novembre 1904 et juin 1905, il loue donc un appartement 5 rue Victor Massé, près de Pigalle. C’est le quartier de Zola, décédé deux ans plus tôt à quelques pas de là, et de Verlaine, sur lequel Zweig prépare une monographie en allant, entre deux promenades, à la Bibliothèque Nationale.

Francophile et francophone, il a travaillé ou travaillera également sur Baudelaire, Rimbaud, Balzac, Stendhal, Montaigne. Il fréquentera Rolland, son maître, Duhamel, et, moins intimement, Rodin, Valéry, Martin du Gard, Gide, Barbusse, Maurois.

Écrivain-voyageur comme tant d’autres, son seul port d’attache fixe est, entre 1919 et 1937, le Paschinger Schlössl, accroché au flanc du Kapuzinerberg au-dessus de Salzbourg.

Il parcourt la France (et l’Europe) en suivant ses écrivains et ses penseurs : la Bretagne de Renan, l’est de Verlaine, le Nord de Rimbaud, la Nièvre de Romain Rolland. Il découvre Marseille (en appréciant particulièrement l’hôtel Beauveau) et les Pyrénées, et séjourne en 1930 au (littérairement) fameux hôtel du Cap d’Antibes. Fin 1934, fuyant le nazisme, il s’installe quelques jours avec Friderike, sa femme, à l’hôtel Westminster de Nice, avant d’embarquer pour un voyage aux Etats-Unis.

Quant à Paris, c’est en 1912 qu’il découvre l’hôtel Beaujolais, 15 rue du Beaujolais, qui donne sur les jardins du Palais Royal et dans lequel il fera de nombreux séjours. Cet hôtel, qui n’existe plus aujourd’hui, se situait à gauche du restaurant Véfour (notre photo).
Lorsqu’il est en travaux en 1922, Zweig s’installe pour un court séjour à l’hôtel des Colonies, 27 rue Paul Lelong. En 1932, il préfère l’hôtel Louvois, près de la Bibliothèque nationale. Lorsque, malgré les efforts de Zweig, de Rolland et d’autres, la guerre éclate, Paris est occupé par l’armée allemande en juin 1940. Zweig s’enfonce dans une dépression qui le mènera au suicide.
Il met fin à ses jours le 22 février 1942 à Pétropolis, près de Rio de Janeiro.

Petite bibliographie
Le Monde d’hier, souvenirs d’un européen. Stefan Zweig. Editions Belfond, 1993.
Stefan Zweig et la France. Robert Dumont. Editions Didier, 1967.
Stefan Zweig, le voyageur et ses mondes. Serge Niémetz. Livre de Poche N°14459.

2 Comments

Ajoutez les vôtres
  1. 1
    Zaradzki Jean

    > Stefan ZWEIG
    Quand la mort délivre de la honte:

    Comment un homme de la qualité de Zweig put-il écrire pendant que résonnaient les bottes des soldats et que les philosophes, disons les hommes libres, sont mis au pilori?
    Il est beau de lui rendre hommage et les textes qui illustrent son site parlent pour lui. Mille fois les mêmes questions reviennent avec insistance: comment était-il possible d’arriver à ce point d’aberration, de cruauté, de bestialité?
    On a dit que le sang de Garcia Lorca rejaillirait sur l’Espagne franquiste qui semble sortir de la torpeur pour se réconforter de progrès libéralistes et je crois que celui de Zweig hantera longtemps les mémoires si le mot remords a encore un sens!!!

    • 2
      Gérard Cotton

      > Stefan ZWEIG
      La Révolution Française instaura les cycles d’un continent toujours suicidé , toujours renouvelé , mais encore suicidaire . L’Europe ne fit qu’hésiter , ne fit donc que basculer entre les Monstres et la Sagesse , entre les Titans et les Philosophes , entre l’Histoire et la Culture . Qu’en sera-t-il demain ? Que pouvons-nous espérer ? Une grande Victoire effacera-t-elle le Doute ? Quelle en sera sa portée ?
      De cette Victoire .
      Un jouisseur réactionnaire au visage ivrogne-poupon , rétrograde , totalement désabusé , aidé en cela d’un pauvre soldat visionnaire fortement désintéressé sauvèrent le continent . Ces deux vieux romantiques portaient des noms devenus aujourd’hui quand même assez célèbres ; le premier s’appelait Winston Churchill et le second Charles de Gaulle .
      Ils trônent tous les deux , plein d’allant , redingote de bronze et mains ouvertes aux Vents , vers le Grand Palais .
      Rien n’est définitivement perdu .
       » Dans le danger croissant croît aussi la vertu qui nous sauve  » disait Hölderlin .
      J’adore notre culture européenne .
      Celle délivrée par le grand Autrichien .
      Et le parfum que m’inspire le souvenir flottant des rues d’Paris .
      J’adore !

Les commentaires sont clos.